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25 septembre 2009

RESTES DE MA MÉMOIRE

 


Crocheté, le présent passé

N’a pas d’avenir.


Je prise l’imprévisible

Retour d’une mémoire enfouie.



Bonheur fugace,

Un rien l’efface ^

Ô

Joie des  grands départs,

Sa trace


______________________________________________________________________



DESCENTE


Retour retors au réalités.

Je vrombis, je rue, je vrille

J’exsude ce qui me reste de caporaléité.

Retour en enfance,

Je défie la gravité

.

Je ne reposerai pas le pied dans la grasse vallée.




Descente.

Eglise déserte ne nourrit plus

Agonie des autels

Lentement

Les fruits murissent  au dehors.

Au dehors.


JE bondis


/


MONTÉE


 Vacances,

Le lieu du souvenir

Et des échappées.




Marche.

Rincé par la sueur

je retrouve béat,

le vent frais de mon ignorance

sauvage.

14 septembre 2009

Mort de Willy Ronis : l'innocence du regard en deuil

 


Willy Ronis est mort ? Mais il l’est depuis longtemps !

Qui porte encore ce regard à la fois tendre et généreux sur le quotidien des hommes ? On a parlé à son propos de “photographe humaniste”. Je préfère dire tout simplement qu’il aimait les êtres qu’il photographiait. On ressent une véritable empathie dans ses photos mais la générosité n’est pas seulement du coté  du photographe, elle irradie aussi de ses personnages. L’enfant qui court et qui sourit à la caméra, la femme qui se dévêtit,  l’homme qui travaille… Qui s’offre encore ainsi au regard d’un photographe “anonyme”  ?

C’est quasiment impossible de faire aujourd’hui des clichés à la Willy Ronis, Edouard Boubat ou Robert Doisneau (autres tenants de la “photographie humaniste”). Notre époque a perdu toute innocence face au regard d’autrui. L’ère est au soupçon, à la défiance ou à la provocation, quand ce n’est pas au “m’as-tu-vu”. Sortez un appareil photo en public et les hommes vous fusille du regard, ils se cachent le visage, tendent la main pour dire “pognon, pognon” ou “droit à l’image”. Les photographes de talents (et de métier) qui exercent aujourd’hui ont pris le chemin des studio ou de l’imaginaire. Ils recomposent leurs images sur ordinateur, travaillent sur l’autofiction ou à partir d’un concept et d’une mise en scène.  Quand ils filment le monde, ils photographient ses déserts et la solitude des êtres. Il n’y a guère que l’art du portrait et les photographes de l’intime, qui perpétuent encore aujourd’hui un certain “humanisme” dans la photographie. Un travail qui demande d’approcher l’autre, de le mettre en confiance et d’établir une relation avec lui. De ce point de vue, Nan Golding peut être regardée comme une photographe de la veine d’un Willy Ronis , humainement parlant. Elle aussi, aime profondément les êtres qu’elle photographie. Même si dans l’œuvre de Willy Ronis, transparaissait également quelque chose qui a bien du mal à se faire entendre aujourd’hui : l’espérance en l’homme.

Reste que, photographier le monde pour  témoigner de ce qu’il est, est important. C’est l’un des principaux moyens -à notre époque d’image et de communication- de se regarder avec un peu de recul. La télévision, telle qu’elle est conçue et faite aujourd’hui, c’est d’abord du son :  du commentaire creux, de la langue de bois ou du blabla vulgaire et aguichant. Le cinéma, ce sont des histoires. Reste les journaux et les livres. Mais qui lit vraiment aujourd’hui ? La photo de reportage est l’un des rares modes d’investigation véritablement en prise avec le monde (avec un certain documentaire de création) qui peut l’aider (et nous aider) à prendre conscience  de lui- (de nous-)même.

Voila pourquoi je défends ardemment la possibilité pour les hommes d’image (dont je fais partie), de  pouvoir prendre des photos dans l’espace public sans être assailli par milles scrupules et revendications concernant “le droit à l’image”. A condition bien sûr, qu’il y ait un œil derrière la caméra et un doigt sur le bouton poussoir. Seules conditions pour que la prise d’image ait une chance d’être mue par le respect voire l’amour du prochain, et serve un propos, une pensée.

Nous sommes tous liés les uns les autres. Il n’y a pas d’image que l’on prenne, qui ne soit pas déjà en nous, ou qui ne s’imprime pas, d’une manière ou d’une autre, en nous-même. “L‘oeil est la lumière du corps. Si donc la lumière qui est en toi est ténèbres, quelles ténébres !”  disait Jésus, il y a 2000 ans. Une manière de dire que l’on est responsable du regard que l’on porte sur le monde, et que celui-ci nous construit et  participe au même titre que tous nos actes, au cours des choses.

Photographier, c’est s’imprégner de la lumière d’autrui mais c’est aussi restituer au monde, sa propre lumière.

Eric Desneux

11 septembre 2009

PRIÈRE DU SOIR


Prière du soir, espoir

Il est tard quand je rentre du boulot ce soir là.  Pour financer la réalisation de mes films, je travaille comme technicien sur les films des autres. Je cadre, je monte, j’étalonne, j’habille, c’est selon. Je préfèrerai promouvoir les deux films sur l’Islam que je viens d’achever mais je suis à cours d’argent. J’ai trois mois pour rétablir mes finances.

J’ai investi 3 ans de ma vie et toutes mes économies dans la réalisation de ces 2 films.  Je n’ai pas regardé à la dépense, soucieux avant tout de réaliser un film qui tienne la route. Je peste tellement contre la médiocrité devenue la norme à la télévision, que j’ai mis un point d’honneur à éviter les travers que j’y j’observe habituellement : bâclage, sensationnalisme, approximation, vulgarité….. Mais cela a un coût : le temps passé à enquêter, approcher les gens, les comprendre, et restituer avec justesse et honnêteté leurs propos et la réalité observée. La télévision (sauf quelques exceptions) n’a que faire des scrupules de “l’honnête homme”, de la recherche du mot et de l’image juste. Sa volonté de frapper les esprits superstructure tout son discours. Elle hyper-simplifie tout, à l’excès. Ce faisant, elle passe à coté de la vraie vie, qui est riche, complexe, profonde, subtile. J’ignore si je suis parvenu à faire un “bon film” (ce sera au public de le dire) mais au moins, je sais que je n’ai pas fait ces films  “à-la-va-vite” et qu’ils sont loin d’être superficiels. 

J’ai travaillé sans producteur, sans subvention, et sans chaine télé cela va sans dire. Cela n’a peut-être pas été mon meilleur choix, car je dois aujourd’hui me consacrer aux films des autres pour vivre, mais c’était la seule manière d’aller au bout de ce projet comme je l’entendais. Reste qu’un film que l'on ne voit pas, c’est un film qui ne vit pas, c’est comme un enfant mort-né. Les caméra DV m'ont permis de réaliser ces films en auto-production, un choix qui me vaudra, je l'apprendrais plus tard de la bouche d'un producteur patenté, après démarchages auprès des chaines, d'être "blacklisté" dans le PAF ayant œuvré sur un sujet des plus sensibles et mis à mal un édile de la place dans sa gestion de la Cité. Mais ceci est une autre histoire...

22h30.  Retour sur le quai. Le métro arrive, je quitte mes pensées. En entrant dans la rame, je vois un homme qui prie. Mes pensées s’allègent et rejoignent celles et ceux que j’ai rencontrés au cour de mon enquête. Je pense en particulier à la phrase de Paulette : “c’est une bonne chose pour nous tous qu’il y ait une prière musulmane qui soit visible”.   Nous sommes en plein ramadan, l’homme tient un Coran à la main. Les crissements et vrombissements du métro couvrent très nettement la légère psalmodie qui s’échappe de ses lèvres mais j’entends comme un lointain murmure, sa prière.  Rien de provoquant dans son attitude. Il reste assis, concentré sur sa lecture. Quelques stations plus loin, trois jeunes femmes entrent dans le métro et s’assoient à coté de lui. Elles rient, s’interpellent, parlent avec emphase, mais lui ne bouge pas. Je me demande même si elles ont remarqué qu’il priait. En Islam, le croyant peut prier n’importe où pourvu qu’il se tourne intérieurement vers Dieu. Aller à la mosquée n’a rien d’obligatoire, exception faite de la prière du vendredi. C’est la force de la prière musulmane que de pouvoir s’affranchir, au besoin, des gestes rituels et du collectif, et de ramener l’homme en lui même, concentré sur le seul verbe divin.

Eric Desneux